samedi 8 février 2014

Du paradoxe...





 Nous sommes en 2014, et 2013 fût une annus horribilis pour les artisans français...

Depuis quelques années les petites maisons tiraient la sonnette d'alarme.
Personne ne les a crues, façon garçon qui crie au loup.

Déja quand Lejaby dépose le bilan en février 2012, personne ne moufte. C'est ensuite Barbara lingerie... On argue les couts prohibitifs des produits issus de ces ateliers.

A partir de 2011, c'est l'hécatombe, mais il est trop tard...

Le 28 janvier dernier, le créateur Max Chaoul qui annonce laconiquement la dissolution de sa maison de couture. On avait cru à une bouffée d'air quand l'un des financiers de la marque avait injecté plusieurs millions d'euros en janvier 2013. 
En vain.
Si cette "chute" fut spectaculairement relayée dans les médias, en raison de la notoriété mondiale de la marque, d'autres se sont éteintes dans l'intimité, sans faire d'autre bruit que celui du chagrin des employés laissés sur le carreau.

Rosi Strella, Matrimonia, Complicité, Elishay, Pia Benelli (Dany pour Alain)... Dans le silence elles se sont éteintes, sans qu'aucune voix ne s'élève dans les bureaux dorés de notre Gouvernement.

De l'avis des artisans les plus chevronnés, on n'avait jamais vu çà. 

Pour Estelle Cloann pourtant reconnue par ses pairs et récompensée par un titre de Maitre-Artisan, le constat est amer : "Je ne connais pas grand monde qui accepterais de travailler pour autant d'heures...et de ne rien gagner au bout après avoir payé ces charges...et je ne parle pas des nuits blanches qu'il faut faire pour livrer une robe de mariée à temps...vue le nombres d'heures que cela nécessite... Au bout de 16 ans en tant qu'Artisan je ne peux pas me tirer de salaire de mon activité... Et peux être prochainement je serais la prochaine après Max Chaoul..."

Car la réalité, ce n'est pas que les grandes marques sous-traitent en Chine, Thailande ou Pakistan, on ne peut pas leur jeter la pierre du grand capitalisme. 
Non.
La vérité, c'est que la clientèle est aveugle et/ou bornée.

Chez Tati ou Complicité, les relations clientèles sont nettes : robes fabriquées en Asie, facturées un prix relativement honnete. Le contact est restreint certes, mais la cliente sait d'entrée de jeu où elle mets les pieds.

Le discours est beaucoup plus flou chez Cymbeline, Pronovias, Hervé Mariage ou Kate Spade...
On met en avant le savoir faire, les matières nobles, les finitions, et l'origine historique de la marque (francaise, espagnole, américaine...) pour justifier des prix exhorbitants.
En omettant au passage de souligner que chez Cymbeline les robes sont essentiellement fabriquées au Maghreb, chez Hervé Mariage on sous-traite en Asie, que Kate Spade a délocalisé une partie de sa production en Chine et que Pronovias n'est plus "made in Barcelona" depuis des lustres.

Sans oublier que Mauboussin, le joailler mythique de la place Vendôme, a dispatché ses ateliers de fabrication dans divers pays d'Asie pour des raisons de rentabilité (30% Chine, 25% Inde et 20% Thaïlande), avant de se retracter et de rapatrier fissa un petit nombre de créations en France.

Il y a donc un paradoxe.

Celui de la cliente qui est capable de mettre 2500euros dans une robes fabriquée en Asie sans même se poser de questions sur son origine, mais qui va juger que 400euros pour une paire de souliers Louis Felix, c'est -je cite- "du vol, de l'arnaque"

Alors en effet si on peut comprendre que des marques prises à la gorge des charges grandissantes que nous impose l'Etat Français fassent le choix de la délocalisation (Pronuptia n'a pas réfléchi longtemps), chacun devrait s'interroger sur l'ambiance de plus en plus moisie qui règne au sein du "Premier Employeur de France", 

Qui a déja commandé son cercueil au cas où.
On est jamais trop prévoyant.